Guide de culture

Le but de cette série d'articles est de vous expliquer tous les secrets de la culture des Cactées et autres succulentes. Si vous êtes débutant, prenez connaissance auparavant de notre notice de culture simplifiée pour acquérir les règles de base.

  1. Le substrat
  2. Les pots et le rempotage
  3. L'exposition
  4. Les arrosages
  5. Les engrais
  6. Les maladies
  7. Les parasites
  8. Les plantations en pleine terre

6 - LES MALADIES

Quels que soient les soins apportés à sa collection, il n'est pas rare de voir certains sujets attaqués par des maladies ou des parasites. Autrefois, un vieil adage disait qu' « une plante bien cultivée n'attrape jamais de maladie ». Cependant, à cause des accroissements des échanges internationaux, de nouveaux parasites sont introduits en Europe avec des végétaux importés mal ou non désinfectés. Ils envahissent de nouveaux territoires sur lesquels les prédateurs n'existent pas, ou bien bénéficient de climats plus favorables à leur multiplication. Il apparaît  ainsi tous les ans en France de nouveaux ravageurs. Par exemple, la Fulgorelle (Metcalfa pruinosa) qui a envahi les jardins du sud de la France, le Thrips de Californie (Frankliniella occidentalis) qui parasite toutes les cultures de plantes à fleurs dans notre pays, le papillon du palmier (Paysandia archon) et le terrible charançon rouge du palmier (Rhynchophorus ferrugineus), qui exterminent tous les palmiers de la Côte d'Azur.

Les champignons responsables de nombreuses maladies sont également en extension et s'attaquent à des groupes de plantes qui étaient autrefois à l'abri de ces problèmes.

D'autre part, les cactus et les plantes succulentes sont originaires de régions très sèches et peu fertiles en humus, naturellement exemptes de maladies. De ce fait, ils sont rarement confrontés à des parasites, et n'ont pas développé de capacité intrinsèque à résister aux champignons, bactéries ou insectes qui prolifèrent en zones humides et tempérées. Il faut savoir que les cactus poussent plus lentement dans la nature qu'en culture, que les conditions difficiles de survie et les rayons ultraviolets les nanifient et leur donnent un épiderme très épais. Quand on les cultive sous un climat tempéré comme le nôtre, ou dans l'atmosphère douillette d'une serre, on les place inévitablement dans un contexte plus favorable à la croissance, avec comme corollaire l'amincissement de leur épiderme, ce qui va faciliter la pénétration des maladies ou les piqûres d'insectes suceurs.

Pour ce qui est des maladies, les plantes succulentes sont donc essentiellement victimes de divers champignons, plus rarement de bactéries, qui se développent par temps humide, ou en cas d'arrosage excessif. Une bonne précaution consiste à systématiquement drainer les pots, à ne pas les poser sur une surface étanche et à bien ventiler dès que la température le permet, pour créer une circulation d'air autour des plantes. Le traitement avec des produits phytosanitaires est possible chez les professionnels, à condition de savoir identifier la maladie. Pour les particuliers, c'est devenu difficile car les produits vraiment efficaces ne sont quasiment plus disponibles à la vente. D'autre part, ces produits sont de plus en plus chers. La perte de quelques plantes par an ne justifie pas forcément la dépense. Bien que les fongicides soient plus efficaces à titre préventif que curatif, il faut surveiller sa collection et traiter quand un problème survient, ou en cas de temps très favorable aux maladies, par exemple en automne quand il pleut beaucoup.

L'identification exacte de l'agent infectieux n'est pas chose facile. Certains symptômes sont cependant suffisamment caractéristiques pour permettre de nommer le genre de champignons ou de bactéries à l'origine du problème. La reconnaissance de l'espèce, par contre, ne peut se faire que par un laboratoire spécialisé. En cas de doute, consultez une entreprise spécialisée dans le diagnostic ou votre distributeur local de produits phytosanitaires en amenant un échantillon des végétaux atteints.

La pourriture des racines est due à des champignons appartenant aux genres Pythium, Fusarium et Rhizoctonia. Ce genre d'infection, non détectée à temps, peut se propager à toute la plante et provoquer sa mort. 

Le Pythium debaryanum est connu pour attaquer les semis et les boutures, mais les plantes plus fortes peuvent aussi être atteintes. Typiquement, il s'agit d'une pourriture humide brun orangé qui remonte rapidement des radicelles vers la tige, en provoquant la liquéfaction des plantules. Sur plantes adultes, les racines coupées montrent une couleur orange. Des tâches brun orangé apparaissent près de la base. A noter que les graines peuvent être également contaminées, ce qui peut expliquer un manque de germination dans les semis.

Le Fusarium oxysporum est un champignon incurable qui pénètre par les racines et remonte lentement dans la plante, pouvant y rester des années dans l'attente de conditions favorables qui vont permettre son expansion finale plus rapide. Au stade latent, des taches de pourriture sèche brun violacé ou blanc rosé peuvent se multiplier vers le haut de la plante. Sur une vue en coupe, on peut voir dans les vaisseaux une couleur orangée. A ce stade, même si la plante semble pousser encore correctement, il n'y a aucun remède. Le champignon envahit toute la plante, progressant de l'intérieur vers l'extérieur. En phase critique, la plante change de couleur, puis diminue de volume et se couvre d'un feutrage rosé par temps humide. Par temps sec, la plante semble se vider petit à petit de l'intérieur en se desséchant. Vue en coupe, on découvre une couleur orangée ou marron et une odeur acre. Les grosses chaleurs de l'été sont favorables au développement de ce champignon.

Le Rhizoctonia solanii est à l'origine de la décomposition des racines des Haworthia ou des Aloe, qui prennent alors une couleur rouge due au manque de sève. Il peut aussi s'attaquer aux jeunes Cactées, provoquant une pourriture du collet marron et leur mort rapide par dessèchement. C'est une maladie qui se rencontre surtout par temps très chaud.

Comme traitement préventif à ces maladies, on peut conseiller de désinfecter le sol avant plantation en le stérilisant dans des bocaux, d'utiliser un terreau et un engrais plus pauvres en azote, d'augmenter le drainage, d'arroser moins, de mélanger de la poudre de charbon de bois au substrat (5%), ou d'arroser la terre avec un fongicide étudié pour le traitement du sol, si disponible dans le commerce. En cas d'attaque légère sur racines seulement, le traitement curatif consistera à couper toutes les racines atteintes et à  faire sécher une ou deux semaines avant de replanter dans un sol neuf. En cas d'attaques plus graves, bouturer le haut de la plante, en s’assurant qu’il ne reste pas de points noirs ou orangés sur la tranche, puis saupoudrer la plaie de poudre de charbon de bois pour la cicatriser plus vite. Les boutures doivent sécher au chaud plusieurs semaines avant d'être replantées. L’enracinement prendra de quelques jours à quelques mois, selon la taille de la bouture et l’espèce. On les arrosera très peu au début, sous peine de faire pourrir les racines naissantes. Dans le premier arrosage, incorporez un fongicide si disponible. Malgré tout, il faut signaler que les plantes atteintes par ce type de maladies sont très difficiles à récupérer, le champignon gagnant très vite le haut de la plante.

La « pourriture noire du collet » ou « Mildiou des Cactées » est due au Phytophthora cactorum. Dans sa phase la plus visible, elle se traduit par un noircissement, puis par un ramollissement de la base de la plante, qui se transforme rapidement en bouillie marron. Il peut arriver par temps sec que la maladie s'arrête toute seule, laissant place à des zones nécrosées noires qui se détachent à la longue. Au départ, elle se situe souvent dans les racines, décomposées par une pourriture noire, mais il arrive que la maladie démarre directement au collet, plus rarement dans les parties supérieures, en cas d'éclaboussures avec de l'eau contaminée par les spores. Le traitement est similaire à celui des précédentes maladies. Pour le traitement détaillé des plantes pourries, consultez notre COURS PRATIQUE N°1. Cette maladie peut aussi attaquer les Euphorbia.

Trichocereus atteint par le Phytophthora cactorum

Plante atteinte par le Phytophthora cactorum,
la pourriture noire du collet.

Trichocereus atteint par le Phytophthora cactorum

Coupe transversale de la même plante.

La maladie due à la bactérie Erwinia carotovora peut être confondue avec celle provoquée par le Phytophthora cactorum. La pourriture commence au collet, prend une consistance très visqueuse et dégage une forte odeur de poisson pourri. Le haut de la plante est jaune avant de pourrir. Il n'existe aucun traitement chimique pour cette maladie. Mieux vaut jeter la plante immédiatement pour ne pas contaminer le reste de la collection.

Les maladies des parties aériennes, à l'origine de diverses taches brunes, orange ou noires, sont dues à divers champignons, appartenant aux genres Helminthosporium, Alternaria, Cladosporium, Colletotrichum, Gloeosporium, Peronospora ... Ils ne provoquent que rarement la perte des plantes atteintes, mais les rendent généralement inesthétiques et invendables.

Toutes ces maladies se traitent avec des pulvérisations de fongicides polyvalents, à base de myclobutanyl ou de propiconazole , si disponibles dans le commerce. Les traitements aux  sels de cuivre (bouillie bordelaise, sulfate de cuivre) ont un effet préventif sur de nombreuses maladies cryptogamiques et bactériennes. Evitez de blesser l'épiderme des plantes lors des manipulations, car les plaies constituent les points d'entrée de ces champignons. Les fleurs épanouies ou les cicatrices laissées par la chute des fleurs sont également une source de contamination très fréquente. N'arrosez pas les plantes par dessus en saison favorable aux maladies. Mouillez-les plutôt au pied.

Maladie non identifiée sur Opuntia pilifera

Maladie non identifiée sur Opuntia pilifera

Maladie non identifiée sur Opuntia

Taches brunes dues à des maladies non identifiées sur Opuntia sp.

L'Alternaria se développe par temps frais et humide, provoquant des petites taches noires circulaires. On le rencontre sur les Cactées, sur le feuillage des Pachypodium , sur le tronc des Euphorbia erythraeae ou sur les Asclépiadacées (Stapelia, Huernia...).

L'Anthracnose des agaves est due au Colletotrichum gloeosporioides. Elle apparaît fréquemment en automne sur les agaves cultivés en plein air, quand le temps devient froid et très humide, à partir des feuilles les plus basses. Pendant l'hiver la maladie monte vers le coeur de la plante. Les feuilles les plus atteintes doivent être coupées au printemps. L'anthracnose peut aussi se rencontrer sur les Cactées plantées en rocaille.

Le Phoma ou Conothyrium s'attaque essentiellement aux yuccas, parfois aux Euphorbia. Des taches elliptiques noires placées dans le sens des nervures peuvent être présentes en grand nombre mais ne forment pas de plaques informes comme l'anthracnose sur les agaves.

Anthracnose sur Agave americana

Anthracnose sur Agave americana. Taches circulaires noires avec un anneau plus clair, s'étendant à toute la feuille pour former des taches importantes de pourriture marron. Maladie hivernale s'arrêtant par temps chaud et sec

Phoma sur Yucca

Phoma sur Yucca gloriosa. Taches elliptiques noires par temps froid et humide.

Le Mildiou (Plasmospora viticola) s'attaque principalement aux Euphorbiacées et Asclépiadacées cultivées en serre, par temps frais et humide. Le sommet des tiges se couvre d'un léger feutrage blanc qui laisse place à des plaques brunes.

La « maladie de la croûte » est due au Diplobotryia sp. Les Cactées cultivées dans de mauvaises conditions d'aération voient leur base se recouvrir d'une croûte brun clair finement craquelée, qui remonte lentement vers le sommet. A ne pas confondre avec le vieillissement naturel des plantes, qui provoque la transformation de la base des tiges en liège brun clair ou marron, mais qui ne remonte jamais aussi haut que la croûte.

Vieillissement sur Ferocactus

Vieillissement d'un Ferocactus.
Couleur marron généralisée près du pied.

Vieillissement sur Trichocereus

Vieillissement d'un Trichocereus spachianus.
Epiderme gris et desséché.

L'Helminthosporium cactivorum ou Dreschlera cactivora est un champignon très destructeur et très contagieux, probablement le plus dangereux dans une culture, car il se développe très rapidement en détruisant le sommet des plantes. Les genres Echinocereus, Eriosyce et Echinopsis (y compris Lobivia et Trichocereus) sont très sensibles, ainsi que les Cereus monstruosus.

La « rouille » se rencontre chez certaines espèces comme Ferocactus latispinus, Gymnocalycium spp., Crassula perfoliata… Il s'agit de petites taches de couleur rappelant la rouille, aux bords plus clairs, qui recouvrent lentement le sommet des plantes. On peut traiter avec un produit contre les maladies du rosier.

Helminthosporium cactivorum sur Echinopsis et Echinocereus

Helminthosporium cactivorum (=Dreschlera cactivora) sur Echinopsis et Echinocereus. Pourriture noire démarrant au sommet, par temps chaud et humide, détruisant les petites plantes en quelques jours seulement. 

Rouille sur Ferocactus recurvus

Rouille sur Ferocactus latispinus. Taches brun orangé pouvant former à la longue des plaques marron. Maladie liée à une forte humidité.

Le Botrytis cinerea est le champignon responsable de la maladie de la toile des semis. On le reconnaît à la présence de filaments gris sur le sol et sur les plantules. La « pourriture grise » attaque parfois les Cactées et les Crassulacées en forme de rosette, lorsque l'ambiance est douce et très humide. La présence d'une pourriture visqueuse et d'une abondante poudre noire est caractéristique de cette maladie à son stade extrême. Le meilleur remède reste l'aération et le séchage rapide des plantes, car il n'y a pas de matière active très efficace dans les produits homologués pour les jardins d'amateurs 

Le Botrytis ne doit pas être confondu avec la fumagine, qui est due à un champignon inoffensif, qui recouvre les épines ou l'épiderme d'une fine épaisseur de poussière noire. Son développement est généralement lié à la présence de parasites animaux comme les pucerons ou les cochenilles, car la fumagine se nourrit du miellat, c'est à dire des déjections sucrées des ces insectes en conditions humides. Les Ferocactus ont des glandes nectarifères qui encouragent également la fumagine à se propager sur leurs épines. Il n'y a pas de traitement chimique particulier contre cette affection. Traiter les insectes parasites pour éliminer leurs déjections. Il est possible de nettoyer les plantes avec un pinceau et de l'eau savonneuse, puis de les rincer. 

Botrytis cinerea sur Echeveria laui.
Pourriture des feuilles par temps humide, suivie de l'apparition d'une abondante poudre noire.

Fumagine sur épines de Ferocactus recurvus.
Rincer les plantes quand des gouttes de nectar apparaissent sur les aréoles. Placer les plantes en atmosphère plus sèche et plus aérée.

Très important : les fongicides ne sont utilisables qu'en plein air ou en serre, jamais dans la maison, en respectant bien les prescriptions, dosages et précautions d'emploi indiqués sur l'emballage. Et notamment : protégez-vous, respectez les abeilles, ne traitez pas les plantes en fleur, attendez la fin de la floraison, ne surdosez pas les produits, ne traitez pas sans raison.

En ce qui concerne la réglementation en Europe, tous les produits de traitements phytosanitaires, d'origine chimique ou naturelle, doivent être homologués et disposer d'un numéro d'Autorisation de Mise sur le Marché ou AMM. Pour consulter la liste des produits de traitement autorisés en France, allez sur le site : https://ephy.anses.fr/ . Vous y trouverez la liste des usages autorisés pour chaque matière active ou chaque produit commercial. Si vous découvrez au fond d'un placard un produit non autorisé en France, ne le jetez pas, vous devez le confier à une entreprise spécialisée dans la collecte des produits dangereux.

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